Intrigué par la bande-annonce du remake annoncé de « Suspiria », un flamboyant classique du film d’horreur mis en scène par Dario Argento en 1977, j’ai décidé ce matin de donner sa chance au produit et…
… Et ben la claque, mes aïeux.
J’ai pris dans la mâchoire un trip filmique dont le résultat n’a plus grand chose à voir avec son illustre parent, hormis son point de départ (une jeune danseuse américaine intègre une académie de danse prestigieuse, dont certaines élèves disparaissent brutalement…).
Et tant mieux !
En effet, plutôt que de livrer un énième copier-coller d’une oeuvre originale, son réalisateur, Luca Guadagnino, se réapproprie totalement le sujet pour nous en offrir sa vision personnelle, doublée d’une vraie proposition de cinéma. C’est franchement rafraîchissant à une époque où les remakes plus inutiles les uns que les autres se bousculent au portillon.
D’une beauté formelle impressionnante – photographie, cadrages, mise en scène, bande son (Thom Yorke) – et incarné par une palanquée d’actrices formidables (Tilda Swinton en tête), ce film est un vrai chef d’oeuvre. Pour autant, il est tout sauf consensuel. L’histoire est réinventée, autour d’une structure en six actes et un épilogue, et enrichie de sous-intrigues absentes de la trame originelle. Tout le métrage est imprégné de la démarche de son auteur qui peut rappeler « Neon Demon » de Nicholas Winding Refn ou bien encore « Mother » de Darren Aronofsky par certains aspects. Les choix esthétiques effectués, pour le moins radicaux lors du climax (et qui risquent fort de laisser certains sur le bord du chemin), en sont une parfaite illustration.
Alors, certes, l’intrigue peut sembler parfois énigmatique, voire même laisser in fine un poil sur sa faim. C’est toutefois bien peu de choses au regard du reste. Par ses multiples niveaux de lecture passionnants (les rivalités au sein de l’Académie, les références au 3ème Reich et la bande à Baader), sa reconstitution particulièrement immersive du Berlin des années 70, ses chorégraphies de danse contemporaine saisissantes d' »animalité », ou plus globalement son ambiance délétère et oppressante, ce film vous attrape par le col dès le début pour ne plus vous lâcher jusqu’à la fin.
Bref, une oeuvre dont la forte personnalité ne devrait pas manquer de séduire les spectateurs qui aiment sortir des sentiers battus.
Par contre, autant prévenir de suite : l’interdiction au moins de 16 ans n’est pas là pour faire joli sur l’affiche. Le film est parsemé de quelques scènes bien (bien) gratinées que je ne recommanderais que très (très) moyennement aux âmes sensibles.
A bon entendeur… 😉
Suspiria de Luca Guadignino, en salles depuis le 14 novembre 2018
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