On l’avait évoqué comme une grosse sortie à venir lorsque nous avions enregistré une émission chez Fred Duval, mais c’est désormais concret puisqu’il est maintenant disponible depuis quelques mois (le 5 octobre), et forcément je me le suis procuré avec envie.
Il s’agit bien sûr du tome 1 de Renaissance : Les déracinés.
Il faut dire que la couverture du dessinateur Emem en met plein les yeux, dans sa mise en scène, comme dans sa réalisation et qu’elle joue pleinement son rôle en annonçant la couleur et nous donnant envie de découvrir ce que recèle son contenu.
Et en cette période de festival de la BD d’Angoulême, dont cette œuvre fait partie de la sélection officielle, ça m’a semblé être le bon moment pour en parler ici.
L’histoire, comme nous l’avait révélé Fred à l’époque, suit donc un premier contact entre terriens et extra-terrestres, mais les protagonistes principaux sont les extra-terrestres, donc nous suivons l’aventure selon leur point de vue, en parallèle de celui des humains.
Et pour une fois, les extra-terrestres ne débarquent pas pour nous envahir comme une énième histoire classique de science-fiction, mais bien pour nous sauver car ils sont technologiquement, philosophiquement plus avancés, développés et sages que les humains; ils ont de surcroit développé une forme d’harmonie avec leur écosystème et un rapport de cohabitation bienveillante avec ce qui les environne.
On change donc des visions anthropocentrées de premier contact entre humains et extra-terrestres, axés sur la domination, la conquête, et le rapport de forces, voyant par mimétisme forcément l’alien comme une menace.
Ainsi, les événements se déroulent en 2084 du calendrier terrestre.
La Terre et surtout les espèces la peuplant étant menacées de disparition, la Fédération des Intelligences Mammifères lance une opération destinée à préserver cet espace de vie et envoie des vaisseaux en émissaires pour tenter de sauver, sur cette Terre devenue à peine vivable, ce qui peut l’être de l’humanité malgré elle (avec les problématiques que cela peut entrainer sur le plan politique et philosophique).
Ainsi, le réchauffement climatique non pris en compte et donc non maitrisé a entrainé la montée des eaux, pourtant prévisible depuis des décennies. Dans ce monde redistribué selon les modifications géographiques, les rapports de forces se déséquilibrent encore plus, les maladies venant s’ajouter à la guerre dans un chaos général.
Bref, le monde tel que nous le connaissons n’est plus qu’un lointain souvenir.
On suit donc sur Terre plusieurs familles confrontées aux problématiques de leur région, voire même de l’enfer sur Terre (champs de pétrole du Texas en flammes, Paris sous les eaux) et tentant tant bien que mal de survire et de protéger leur proches.
C’est à ce moment là que plusieurs vaisseaux débarquent sur terre.
Extraterrestres anthropomorphes originaires de Näkän, une société pacifiste et altruiste, Swänn et Säti sont les principaux protagonistes à travers les yeux desquels on suit le déroulement de l’histoire.
A peine mariés, ils doivent pourtant quitter leur planète et font partie de l’expédition terrestre, mais seront séparés et répartis sur deux régions distinctes du globe terrestre: le Texas et Paris (ce qui permet d’avoir un récit pas uniquement centré sur un point géographique).
Drôle de voyage de noces!
Dans Les déracinés, l’histoire se met en place et ce premier tome (sur 3) sert essentiellement à poser les enjeux et présenter les personnages, mais lance aussi les hostilités, au sens propre comme au figuré.
On a donc un premier contact humain / alien, mais plus particulièrement vu du côté Alien qui découvrent les humains au fur et à mesure de l’intervention.
La civilisation et les modes de vie des aliens sont bien développés et apportent de la profondeur aux personnages. J’ai d’ailleurs personnellement eu plus d’empathie pour les aliens que pour les humains car plus développés, et plus sympathiques à mes yeux, face à des humains assez fades et dont les réactions sont peu glorieuses face à une espèce venue amicalement leur prêter main forte pour leur propre survie.
Cela met en exergue le rapport à l’autre, à l’étranger qu’on envisage selon ses propres craintes et croyances et questionne sur l’opportunité de vouloir aider quelqu’un contre son gré, et selon quelles bases peut-on trouver qu’une action est légitime à être lancée? (on pense forcement aux problèmes domestiques au sein des pays, mais aussi des opérations extérieures, militaires ou humanitaires).
Au scénario, on a donc notre copain Fred Duval, mis en images et en couleurs par Emem (un autre très sympathique compère rouennais), Fred Blanchard apportant sa pierre à l’édifice pour le design.
Ce premier tome était très plaisant et très beau à mes yeux.
Le dessin et les couleurs d’Emem se prêtent parfaitement cette histoire, certaines planches sont magnifiques et impressionnantes de détail, avec un rythme super efficace. La mise en scène, mise en page et découpage sont également de super qualité.
Scénario : Fred Duval
Dessins : Emem – Fred Blanchard (design)
Couleurs: Emem
Chez Dargaud
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